À la manière d’une amoureuse méconnue
Mon amour,
Tapie dans l’ombre, je vous guette ; vous passez tous les jours devant ma petite boutique sans me regarder.
Je connais tout de vous : vos heures d’arrivée, les traits tout bouffis de sommeil ; que vous êtes alors émouvant… Le petit café que vous allez prendre avec un de vos collaborateurs vers dix heures. Vous sortez alors du bureau, saluez la compagnie en plaisantant, entrez au tabac du coin ; quel air, quelle allure, altier… Vous êtes superbe.
Vers une heure, vous repartez sur les chapeaux de roue ; je suppose que vous allez déjeuner et je vous perds pour quelques heures, triste de ne pas partager avec vous le pain de l’amitié, le baba au rhum de l’amour.
Quelquefois, vous repassez comme un fou et je vous admire.
J’admire votre jeunesse et votre force, votre allure de félin prêt à dévorer sa proie.
– Je suis votre proie, prenez-moi.
Hier, sur le boulevard, je vous ai suivi quelques minutes et vous avez dit à cette horrible créature qui était avec vous, fausse blonde au manteau de faux vison (comment voulez-vous qu’elle soit sincère?) vous avez dit à cette peste avec une verve inimitable :
« Merde, demain, j’ai un an de plus »
Que c’était beau ; la mélodie de votre voix, une musique des anges…
C’est pourquoi, je me permets à l’occasion de votre anniversaire de faire éclater mon amour.
Je vous souhaite un bon, un très bon anniversaire.
Nous souhaiterons les suivants ensemble, n’est-ce pas ?
Votre Hortense
Hortense Baisencoin
Triperie du marché