À la manière de ton chien
Vraiment, je n’ai rien compris ce matin.
D’ordinaire, il se lève en sifflotant, me fais un clin d’œil, chante sous la douche, se rase en écoutant les informations, déjeune et me donne un sucre.
Aujourd’hui, rien ne va plus.
Le réveil a sonné ; il est resté là, dans son lit, sans bouger, pensif, regardant le plafond puis il a soupiré et s’est levé.
Il a déambulé un peu dans la maison puis il est entré dans la salle de bains, et là, il y a eu de drôles de choses.
Il a retiré son pyjama et s’est regardé dans la glace, longtemps, très longtemps ; il rentrait le ventre, bombait le torse et disait : « Je ne suis pas encore foutu » et puis il attrapait ses petits bourrelets et faisait une drôle de tête ; il recommençait. Il rentrait tellement le ventre qu’il est devenu tout rouge.
Et puis, il s’est approché de la glace, tout près, tout près ; il a passé la main dans ses cheveux, une fois, deux fois ; il s’est approché encore plus et a tout détaillé : les rides qu’il a sur le front, les drôles de poches qu’il a sous les yeux ; il a tiré sur ses pommettes pour se remonter un peu les bajoues, il a même ouvert la bouche et s’est regardé les dents ; un drôle de sourire forcé et puis il s’est remis de profil et il s’est encore regardé ; il s’est mis à siffloter mais ce n’était pas pareil et je ne me suis pas approché.
Il a vu que j’étais là, il s’est baissé, m’a caressé et il m’a dit :
« Mon pauvre vieux, toi aussi tu vieillis »
Je n’ai pas compris.