Voila l’été

Aube,
Corps qui s’éveillent,
Blottis au fond de notre lit
On s’est aimé et reaimé.
Printemps joli

Un peu plus tard dans la journée :
« Ma Douce, peux-tu m’aider ?
La banque, les papiers, les dossiers ;
Si tu veux bien, on va s’organiser. »
Printemps sérieux

Vers midi, le téléphone.
Tu murmures — Je m’approche — Tu raccroches — On rappelle.
Qui rappelle ?
Et toi, tout d’un coup dressé :
« C’est la femme que j’aime, que je veux épouser. »
Printemps éclaté

Après-midi, toute cassée ;
Pantin désarticulé, le long de la Seine j’ai marché,
Pleuré, pleuré ; l’eau était glacée.
Printemps désespéré

Et puis je suis rentrée.
« Viens, on va s’en aller ;
On ne peut rester là à s’entretuer. »
On a roulé, encore roulé ; la mer nous a arrêtés.
Horizon démesuré.
Printemps retrouvé

On a vu les bateaux, les voiliers ;
Au bout du quai, on s’est assis. On a parlé.
On a marché sur les pavés, tous deux brisés.
À l’hôtel, on s’est couché ;
On s’est aimé et reaimé.
Printemps ressuscité ?

Le lendemain, on s’est quittés.

Vous, les femmes qui me lisez, écoutez :
J’ai cru que tout était fini,
Que ma vie était foutue, que j’avais tout perdu.
J’ai dit bonjour au désespoir, aux insomnies ;
J’ai hurlé, crié, pleuré, seule dans mon lit.
J’ai même vu un psy !
Et puis, et puis…

J’sais plus aimer, ça c’est cassé,
Mais j’sais encore rire ou chanter.
Printemps volé

La liberté, je l’ai retrouvée.
Du temps, de la disponibilité,
De l’appétit, de l’énergie ;
L’envie de rire, de m’éclater.
Printemps léger

Et puis, et puis… Tiens, j’en oublie !
Aux comptes j’ai échappé,
Aux chaussettes à laver, aux chemises à repasser,
Aux grands discours, aux matchs de foot.
La jalousie ? Tiens, c’est fini !
Voilà l’été

Et puis, et puis… Et dans mon lit ?
Quand les autres, les copains, les amis ont su la triste vérité,
Ils s’y sont précipités.
Torride été

Et lui ?
Tout se retrouve un jour, chacun son tour.
Il aimera, il souffrira, il regrettera
Cette femme si gaie, exceptionnelle,
Charmante, exquise,
Qui le faisait rire, qui le distrayait,
Qui le poupoulait et qui l’aimait ;
Qui avait nom « Jeanne ».
C’est moi, mais oui, car c’est fini, je suis partie.

Trop bien pour lui,
Ça c’est bien dit !